Abécédaire du tournage éthique avec des animaux

Cet abécédaire a été rédigé afin d’apporter aux technicien.ne.s du cinéma et de l’audiovisuel une connaissance actualisée des enjeux de protection animale. Il s’appuie et complète l’article de Laëtitia Pelé pour aider les assistant.e.s réalisation dans la préparation des tournages avec des animaux domestiqués.

L’objectif de ce document est triple :

• Mettre nos pratiques en conformité avec la loi de 2021 de lutte contre la maltraitance animale ;
• Rendre l’expérience du tournage aussi positive que possible pour les animaux, qui contribuent à la concrétisation de nos imaginaires, et garantir leur sécurité ainsi que leur bien-être à chaque étape de création d’un film ;
• Anticiper l’après tournage pour que la participation à cette aventure ne les condamne pas à une existence captive, en refuge, ou à l’abandon dans des conditions inadaptées, sans possibilité de répondre à leurs besoins primaires.


A comme Anesthésie : L’anesthésie des animaux, pour simuler leur mort, est une pratique courante de nos plateaux ; elle est pourtant illégale (voir l’article de Corinne Lesaine dans La Semaine Vétérinaire n° 1948, 10 juin 22 « Peut-on anesthésier un animal domestique sur un lieu de tournage ? »). En effet, l’anesthésie implique l’administration de produits pharmaceutiques que seul.e.s les vétérinaires sont autorisé.e.s à administrer. Or, l’ordre des vétérinaires proscrit l’usage de ces produits en dehors de certaines conditions thérapeutiques et lorsque l’animal n’est pas en sécurité, puisque ainsi drogué, il n’est plus en mesure de s’enfuir en cas de danger. Certain.e.s dresseur.e.s proposent des solutions alternatives comme nous le détaille les dresseur.e.s de la Compagnie Dog Trainer sur leur blog. Pour les animaux qui ne pourront être dressés à simuler la mort, une alternative fictive devra être trouvée dès la préparation, en concertation avec l’accessoiriste.


A comme Anthropomorphisme : Attribution de caractéristiques du comportement ou de la morphologie humaine à d’autres entités comme des dieux, des animaux, des objets, des phénomènes ou des idées. En éthologie, cela consiste à projeter les motivations et les émotions humaines sur un animal.


B comme « Bébés » : La loi prévoit que le dressage des animaux ne peut intervenir chez des individus trop jeunes. Aussi, tout animal sollicité avant son sevrage (chez les mammifères, processus par lequel une mère cesse définitivement d’allaiter son petit) devra nécessairement être transporté avec sa mère et le reste de la portée. Enfin, 95 % du temps de l’individu juvénile est consacré à dormir et s’alimenter, le plan de travail devra respecter ses besoins physiologiques, sans exception. C’est pourquoi le tournage avec ces petits est très compliqué. Si un scénario prévoit la mise en scène d’animaux en bas âge, il faudra en priorité chercher une alternative, ou – à défaut – demander l’avis d’un.e vétérinaire pour savoir si les actions demandées à l’animal sont possibles et dans quelles conditions l’accueil de l’individu juvénile permettra d’assurer sa sécurité physique et psychologique. Par ailleurs, il est interdit par la loi sur la protection animale de faire travailler une femelle gestante (peu importe l’état d’avancement de la grossesse).


B comme Bien-être animal (BEA) : Selon la définition de l’ANSES dans un rapport de 2018, « Le bien-être d’un animal est l’état mental et physique positif lié à la satisfaction de ses besoins physiologiques et comportementaux, ainsi que de ses attentes. Cet état varie en fonction de la perception de la situation par l’animal ». Mais comment évaluer son état de satisfaction et ses attentes sans verser dans l’anthropomorphisme ? Le « Farm Animal Welfare Council » a proposé une définition applicable aux animaux de ferme et d’élevage laquelle s’appuie sur 5 libertés fondamentales. Celles-ci permettent d’évaluer objectivement le bien-être des animaux domestiqués et qui doivent être impérativement remplis comblées dans le cadre d’une captivité domestique ou professionnelle :

• Liberté 1 : Ne pas souffrir de faim ou de soif (accès à une eau fraîche non souillée, accès à une alimentation adaptée et de qualité chaque jour, sans frustration ni compétition avec ses congénères) ;
• Liberté 2: Ne pas souffrir de contraintes physiques et disposer d’un environnement adapté (accès à un abri contre les aléas climatiques, d’une zone de repos confortable, propre et éloignée du bruit ou des intrusions, distance ou sociabilité avec d’autres espèces animales ou individus de son espèce) ;
• Liberté 3 : Ne pas ressentir de douleurs, et être soigné en cas de blessure ou de maladie ;
• Liberté 4 : Être libre d’exprimer les comportements naturels propres à son espèce (faire des ballades sanitaires plusieurs fois par jour, faire des activités physiques régulières, avoir la liberté de flairer des odeurs, de creuser, de rencontrer d’autres animaux dans le cas d’une espèce sociale, avoir accès à des temps de repos adaptés) ;
• Liberté 5 : Être protégé de la peur et de la détresse (ne pas être exposé à des pratiques d’éducation ou de soins provoquant la frustration, le stress, la souffrance psychologique ; pouvoir se soustraire librement à une situation douloureuse ou déplaisante, être écouté dans l’expression de ses émotions ou de ses états physiques – fatigue, peur, lassitude, auxquels une réponse bienveillante sera apportée.

Pour aller plus loin :

Concernant les équidés (chevaux, ânes et zèbres) sur agriculture.gouv.fr ;
Les fondamentaux du bien-être animal selon Dog Trainer et Alokiconseil (PDF) ;
Sans oublier l’article du CNR BEA à ce sujet (Centre national de référence pour le bien-être animal).


C comme Captivité animale : État d’un animal gardé par des humains, empêché de s’échapper. Le terme s’applique habituellement aux animaux non domestiqués, mais peut être utilisé pour désigner les conditions de vie de certains animaux domestiques et de ferme. La captivité peut être vécue différemment selon l’espèce et plus particulièrement en fonction des individus considérés ou de leur histoire. Certains peuvent ainsi développer des troubles du comportement tels que la stéréotypie, l’automutilation, l’hyperactivité sexuelle, un auto-toilettage excessif, l’arrachage de poil, ou l’agressivité (ex. de l’orque Tillikum, dont l’histoire est racontée dans le documentaire « Blackfish »). Ces comportements seraient associés au stress, au manque de stimulation et à des dysfonctionnements sociaux (solitude, inadaptation au groupe captif). Par ailleurs, une étude menée par l’« Australian National University » a démontré que la captivité des animaux non domestiqués (dits sauvages) modifient leur morphologie et leurs comportements au fil des générations, entravant ainsi leur possible survie en milieu naturel. La fin progressive de la captivité de ces espèces fait aujourd’hui l’objet d’une campagne française initiée par des associations de défense des droits des animaux, telle PAZ. Un colloque sur le thème « sortir de la captivité animale » s’est tenue à cet effet le 1er décembre 2022. Au cours de cet événement, l’utilisation des animaux dans les industries du divertissement a été explicitement dénoncée.


C comme Combat : La mise en scène de vrais combats entre des animaux (type chiens ou coqs) est explicitement interdite par la loi. L’action prévue au scénario devra être soit trichée, soit réalisée en post-production. Pour les scènes d’attaque d’un animal vers un être humain, l’avis d’un.e dresseur.e est indispensable. Ces scènes seront peu répétées et placées le plus tardivement possible dans le plan de travail, car elles peuvent nuire à la relation entre l’animal et son partenaire de jeu humain. Enfin, certaines actions devront être impérativement trichées par la mise en scène car elles présentent des risques trop importants pour la sécurité des interprètes (humains et animaux), comme une attaque de chien au niveau de la gorge.


D comme Domestication (éthologie) : Adaptation génétique et comportementale d’une espèce à son environnement captif. « Le processus de domestication consiste en une modification des traits comportementaux et physiologiques d’une espèce animale sur plusieurs générations, résultant de la sélection de caractéristiques par (l’humain), telles que la docilité ou la prolificité, lors de la reproduction des individus, et ce en vue de son profit matériel, social ou symbolique ». Mais comme le précise les auteurs de la Fondation « Droit Animal – Ethique et science », la détention en captivité d’un individu ne suffit pas à rendre un animal domestique.

Source : « De la distinction du statut juridique des animaux domestiques et sauvages » par la Fondation Droit Animal.


D comme Domestique: La distinction entre espèces sauvages et espèces domestiques ne fait pas l’objet d’un consensus, selon que l’on se place du point de vue de la science (biologie, éthologie), des institutions nationales ou de la Loi.
D’après la définition de l’éthologue Michel Kreutzer (in Folies Animales, p. 28), les espèces domestiques sont celles dont l’environnement naturel a été transformé. En France, leur liste est établie de façon exhaustive par arrêté et les espèces ainsi décrites relèvent de la compétence du Ministère de l’agriculture, tandis que les espèces dites sauvages sont rattachées au Ministère de l’environnement, en leur qualité de « patrimoine collectif ».
Mais comme le précise la Fondation « Droit Animal – Éthique et science », cette distinction réglementaire ne correspond pas parfaitement à la classification retenue par les scientifiques qui définissent a contrario les animaux sauvages comme ceux appartenant à une « espèce n’ayant subi aucune modification génétique par sélection ». L’animal domestique, par opposition, est celui qui « a fait l’objet d’une domestication ».
En fonction de cette classification, le régime de protection des animaux n’est pas le même, ceux de ces espèces ayant des « propriétaires » ont obtenu en 2015 la qualité « d’êtres doués de sensibilités » et sont davantage protégés que les autres. Une précision supplémentaire, particulièrement importante en ce qui concernent les animaux utilisés sur les tournages : la loi française assimilent les animaux sauvages captifs ou apprivoisés (donc dressés) à la catégorie « domestique ». Ils sont donc rattachés à leur régime juridique tant qu’ils vivent sous le contrôle d’un.e « maître.sse ».

Source : Muriel Falaise, Droit Animalier, Lexifac Droit, 2020″


D comme Douleur : « Expérience aversive, commune aux humains et à de nombreuses espèces d’animaux », ayant « des composantes sensorielles, cognitives et émotionnelles » (Michel Kreutzer, Ibid., p. 59).


D comme Dressage : Action de dresser un animal, en vue de l’habituer à faire ce que l’être humain attend de lui (Petit Robert, 2001).


D comme Dresseur : d’après la définition de la Convention Collective de l’audiovisuel, il s’agit de la personne qui « gère les animaux pour une production ». Son exercice est soumis à l’acquisition de qualifications certifiées, depuis 2016, par obtention de ACACED (pour le travail avec des animaux dits « de compagnie »). Les professionnel.le.s du dressage doivent en outre posséder un véhicule adapté au transport sécurisé d’animaux et obtenir l’autorisation de déplacement pour tout trajet supérieur à 65 km. Dans le spectacle vivant ou la mise en scène cinéma, il peut être rencontré le terme de « performeur animalier », soit un.e artiste qui travaille avec des animaux dans la conception de spectacles et/ou de performance.


E comme Ethologie : Science des comportements des espèces animales dans leur milieu naturel.


E comme Exploration : Il s’agit d’un comportement naturel d’exploration de son environnement, en particulier chez les jeunes individus (éthologie). Elle fait partie des trois types de récompenses – avec la nourriture et le jeu – utilisés dans le cadre de l’éducation éthique d’un animal. Elle est employée pour amener l’animal à rechercher, dans un décor, une ressource ou un jouet, et peut être une motivation en elle-même chez un individu particulièrement enthousiaste dans cet exercice.


E comme Explosion : Par principe, elles sont à proscrire en présence d’animaux. Abstraction faite du stress généré, cela peut les conduire à des réactions imprévisibles et occasionner des dommages notamment auditifs. Dans le pire des cas, ils s’enfuiront, voire se blesseront ou blesseront dans leur fuite des membres de l’équipe ; dans le meilleur, ils ne seront plus en capacité d’exécuter les actions qui leur seront demandées. La consultation du référent bien-être animal et des dresseur.e.s est là encore indispensable dans la décision, soit de préparer l’animal à cette situation, soit de trouver une alternative pour qu’il ne soit pas présent sur le plateau au déclenchement de la détonation.


I comme Imprégnation : …ou empreinte pour une méthode d’apprentissage pratiquée sur des individus souvent très jeunes, à partir des recherches de l’éthologue Konrad Lorenz. Elle est utilisée par des dresseur.e.s pour créer un lien direct entre l’animal et son humain, qui devient la référence comportementale de l’individu ainsi dressé. Bien que considérée comme une méthode « douce », elle est très controversée car elle crée une perturbation irréversible des liens de sociabilité chez l’animal et notamment des comportements sexuels.

Les méthodes d’imprégnation nécessitent (…) de nombreuses précautions. Souvent irréversibles, elles ne permettent pas toujours la réintroduction de l’animal dans un groupe de l’espèce, ne diminuent pas non plus le niveau de dangerosité à l’être humain et la familiarité au dresseur ne doit pas laisser supposer qu’il y aura une familiarité identique à d’autres personnes. – Selon Corinne Lesaine, vétérinaire (source)


I comme Individu : Être vivant ou végétal, distinct et délimité. L’individu est l’unité la plus petite, donc indivisible (étymologie), d’un groupe. Il est un sujet distinct, ayant un corps et une identité unique. La philosophie le définit comme l’être sentient, c’est-à-dire celui qui possède une conscience et une sensibilité. Si la sentience des espèces animales est unanimement reconnue, celle de leur conscience est plus controversée. Parler d’individualité chez un animal implique trois conséquences principales qu’il convient de prendre en compte pour préparer au mieux un tournage :

• L’individu animal est un être sentient, doté d’une mémoire, de capacités d’anticipation et donc d’intelligence, d’une perception du monde et de son environnement qui lui est propre, ainsi que d’une sensibilité aux émotions positives ou négatives ;
• L’individu animal possède une individualité dont les réactions, les préférences et l’affectivité ne sauraient être réduites aux caractéristiques majoritaires de son espèce ;
• L’individu animal a un statut juridique et des droits reconnus. Le non-respect de ces droits peut engager la responsabilité pénale des personnes en charge contractuellement de son bien-être.

Le casting des animaux-acteurs ne peut donc pas être strictement affaire d’esthétique. La prise en compte de l’histoire, du caractère et de la relation de l’animal à son/sa dresseur.e dès cette étape permet de choisir l’individu le plus à même de répondre aux conditions de tournage ainsi qu’aux impératifs du scénario.

Source : P. Le Neindre, M. Dunier, R. Larrère, P. Prunet, coord., La conscience des animaux, Éditions Quae, Versailles, 2018 / Michel Kreutzer, Folies Animales, Le Pommier, Paris, 2021 / Frans de Waal, Sommes-nous trop « bêtes » pour comprendre l’intelligence des animaux ?, Les Liens qui Libèrent, 2016.


J comme Jeu : Il est défini comme une activité physique ou mentale purement gratuite, qui n’a d’autre but que le plaisir qu’elle procure. Cette activité sociale a une fonction de sociabilité, de préparation à la chasse ou au combat. Dans les relations entre les humains et les animaux, les jeux permettent de créer ou d’approfondir un lien affectif en associant l’humain-soigneur à des activités agréables. Cependant, l’envie de jouer apparaît chez l’animal seulement lorsque celui-ci se sent en sécurité et lorsqu’il a confiance en l’humain avec lequel il devra interagir. Cela signifie qu’une grande partie du travail des dresseur.e.s consiste à créer cette relation de confiance et ce sentiment de sécurité chez l’animal – dans les conditions d’un tournage – afin qu’il soit en capacité, littéralement, de jouer. Enfin, cela signifie par exemple que les séquences de complicité entre un animal-acteur et un.e comédien.ne qu’il ne connaît pas, doivent être préparées soit en amont, soit être placées suffisamment tard dans le plan de travail pour que les deux protagonistes aient eu le temps de nouer une relation de confiance.

Source : « Comment apprendre à son chien sans nourriture ? » Par Dog Trainer


M comme Maltraitance : La maltraitance, telle que définie par le Code Pénal, peut prendre plusieurs formes allant de la mise en danger à l’abandon, jusqu’aux aux actes de cruauté. Elle ne concerne que les espèces domestiques, apprivoisées ou captives. En ce qui concerne, les espèces non domestiquées et libres, leur statut est réglementé par le Ministère de l’environnement et leur protection assurée au titre des lois sur la préservation de la biodiversité. Voici la liste des actes de maltraitance interdits et punis par le code pénal :

Mauvais traitements (750 euros d’amende) : détenir un animal non identifié ; priver celui-ci de nourriture et d’eau ; le laisser sans soins en cas de maladie ou de blessures ; le placer dans un habitat ou un environnement pouvant être une cause de souffrances, de blessures ou d’accidents ; utiliser des dispositifs d’attache, de contention, de clôture, de cages ou tout mode de détention inadaptés ou de nature à provoquer des blessures ou des souffrances ; mettre en oeuvre des techniques d’élevage pouvant occasionner des souffrances inutiles aux animaux compte tenu de la sensibilité de l’espèce concernée et du stade physiologique des animaux ;

Abandon : Puni de 3 ans de prison et 45 000 euros d’amende, si l’abandon a entrainé la mort de l’animal, l’auteur.e risque jusqu’à 5 ans de prison et 75 000 euros d’amende ;

Sévices graves et actes de cruauté (jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende) : il n’est pas nécessaire que l’animal soit mort, ou que les actes se soient déroulés en public pour que le délit soit reconnu. En revanche, il sera recherché l’intentionnalité voire le sadisme de l’auteur.e pour que la cruauté ou la gravité soient établies. Ainsi, l’ensemble des actes de maltraitance précédemment énumérés peut entrer dans cette catégorie si l’auteur.e avait, en les accomplissant, la conscience et la volonté de faire souffrir ou de tuer l’animal. L’exception à cette règle concerne la tauromachie, qui reste autorisée mais exclusivement dans les localités où il existe une tradition locale ininterrompue et ancienne ;

Atteintes sexuelles : les peines prévues sont les mêmes que pour les actes de cruauté et l’abandon. Le fait d’enregistrer volontairement, peu importe le support, des images d’atteintes sexuelles commises sur un animal constitue un acte de complicité, puni également d’un emprisonnement maximum de 5 ans et de 75 000 euros d’amende. Enfin, la diffusion sur Internet de telles images est punie de 2 ans de prison et de 30 000 euros d’amende ;

Atteintes volontaires à la vie d’un animal (6 mois de prison, 7500 euros d’amende) : c’est le fait de donner, publiquement ou non, la mort à un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité, en dehors de toute activité légale. Le tribunal peut également prononcer une interdiction de détenir un animal (définitive ou non) et l’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou sociale en lien avec les animaux ou la protection animale ;

Atteintes involontaires à la vie ou à l’intégrité d’un animal : blesser ou tuer involontairement un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité est également un délit. Cette blessure ou cette mort involontaire peut être les conséquences de maladresse, imprudence, inattention, négligence ou non respect d’une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi. En cas de condamnation du propriétaire de l’animal ou si le propriétaire est inconnu, le tribunal peut décider de remettre l’animal à une association de protection animale.

Pour aller plus loin : Comment signaler une maltraitance animale et quelles sont les sanctions ? – Service Public


N comme Nocturne ou Diurne : Certaines espèces ne sont actives que le jour (tortues, oiseaux, poules) certaines que la nuit (rongeurs, chats). Dès l’étude, une attention devra être accordée à cette caractéristique afin d’adapter le plan de travail à leur cycle naturel d’activités. Ces informations sont faciles à recueillir auprès d’un.e vétérinaire (généraliste ou spécialisé.e N.A.C. si l’espèce est rare ou exotique). Dans tous les cas, la présence du dresseur.e de l’animal sélectionné permettra d’affiner ces données naturelles.


P comme Prédation : Une scène dans laquelle un animal pourchasse un autre animal- proie est également interdite par le Code Pénal en raison du stress et des risques de blessures encourus par les animaux (voir entrée « maltraitance »).


Q comme Qualifications : Pour exercer des activités avec des animaux d’espèces domestiques, le Code Rural et de la Pêche Maritime rend obligatoire des connaissances minimales, reconnues par l’obtention d’une Attestation de Connaissances pour les Animaux de Compagnie d’Espèces Domestiques (ACACED), valable 10 ans. Parmi les activités citées figurent : « élevage, éducation et dressage » ; « transit ou garde d’animaux domestiques », « présentation au public de chiens et de chats ». Voici la liste des conditions à réunir pour obtenir cette ACACED :

Justifier d’un diplôme, d’un titre ou d’une certification attestant de la détention des connaissances requises ;
Justifier d’un certificat de capacité délivré avant le 1er janvier 2016 (CCAD, remplacé par l’ACACED à partir de cette date) OU Suivre une formation dans un des centres de formations habilités par le Ministère de l’agriculture et réussir l’évaluation ;
Déclarer son activité auprès de la Direction Départementale de la Protection des Populations (DDPP) de son département
Actualiser ses connaissances sur la ou les espèces concernées par son activité tous les 10 ans et renouveler son ACACED.


R comme Récompense : La récompense est une technique de dressage dite bienveillante qui permet d’associer une action donnée à une récompense, c’est-à-dire à une source de satisfaction et donc de motivation. Elle est utilisée dans le cadre du dressage par conditionnement, soit un apprentissage par association entre un signal et quelque chose d’agréable. La récompense majoritairement utilisée avec les animaux domestiqués est la nourriture, en complément de la ration quotidienne nécessaire. Mais chez certains individus, celle-ci ne sera pas ou plus efficace. Il faudra donc stimuler ou récompenser l’animal par le jeu ou l’exploration. La motivation d’un animal à exécuter l’action attendue au scénario dépend encore une fois de sa relation avec son/sa référent.e humain.e qui aura su identifier au préalable ses préférences.


R comme Référent.e bien-être animal : depuis le 1er janvier 2022, tous les élevages d’animaux domestiques, d’animaux sauvages apprivoisés ou tenus en captivité doivent compter dans leur équipe un référent « bien-être animal » (arrêté du 16 décembre 2021). Cette personne devra obligatoirement avoir suivi au préalable une formation spécifique à ces enjeux. Sur les plateaux de cinéma en France, iels ne sont pas encore obligatoire. Mais ce poste existe aux Etats-Unis et est obligatoire pour l’obtention du label de l’American Humane Association. Cette association est garante de la protection et du bien-être des animaux sur les plateaux de tournage et seule habilitée à autoriser la mention au générique de la phrase « No Animals Were Harmed » (« aucun animal n’a été blessé»). Pour cela, iels ont créé le poste de « Animal Safety Representatives » (délégués à la sécurité animale), formé.e.s et nommé.e.s indépendamment des sociétés de production. Iels interviennent dès que la présence d’animaux est prévu au scénario et ont autorité pendant le tournage en matière de sécurité, de bien-être et de prévention du stress chez les animaux employés pour les besoins d’un film. Ce sont les garant.e.s, formé.e.s, des animaux acteurs et de leurs intérêts. Néanmoins, leur indépendance a pu être questionnée notamment à l’occasion du tournage de « Cheval de guerre », réalisé par Steven Spielberg au cours duquel un cheval a été tué.


R comme Responsabilité Civile et Pénale : Maître Eric Barbry explique : « Si la responsabilité du donneur d’ordre (cinéaste, publicitaire, …) a parfois été engagée quant au choix d’un prestataire qui n’aurait pas respecté ses obligations en terme de procédures administratives (ouverture et certificat de capacité), celui-ci doit se pencher plus avant encore sur les conditions d’utilisation des animaux au regard de la réglementation sur leur protection. En effet, au-delà de la responsabilité pécuniaire liée à l’inobservation des autorisations administratives, c’est sur le terrain de la responsabilité pénale que le donneur d’ordre pourrait se voir condamné pour complicité avec un dresseur (professionnel ou privé) peu soucieux des règles de protection des animaux. »

Dans le cadre de la préparation et du tournage d’un film avec des animaux, plusieurs membres de l’équipe peuvent voir leurs responsabilités pénale et/ou civile engagées si une situation de maltraitance est prouvée, avec ou sans intentionnalité, ou si un accident survenait (contre l’animal – pénale – ou en conséquences d’une action de l’animal – civile) : le/la propriétaire de l’animal ; le membre de l’équipe officiellement en charge de la protection de l’animal sur le plateau (dresseur.e, référent animalier, accessoiriste, etc.) ; le réalisateur/ la réalisatrice ; les producteurs/productrices.

Avant le début d’un tournage, les propriétaires légaux de l’animal – dresseur.e ou particulier pour un animal figurant – établissent un contrat avec la production par lequel les conditions d’accueil et de tournage, ainsi que les points de vigilance à observer en fonction des besoins de l’espèce utilisée pour la narration, sont détaillés. Cet engagement entre le/la propriétaire et l’équipe de production doit être conforme à la législation en vigueur en France sur la protection et le bien-être animal de chaque espèce employée pour le projet. Cela suppose que chacune des parties ait les connaissances nécessaires à l’établissement de ce protocole d’accueil, ou à défaut, qu’un.e expert.e de l’espèce et de la réglementation qui lui est associée, aient été consulté.e.s au préalable.

Les cas de maltraitance d’animaux sur les plateaux de cinéma commencent à être jugés devant les tribunaux en France et certaines équipes ont été condamnées, soit pour maltraitance, soit pour complicité de maltraitance. On peut citer à titre d’exemple la plainte déposée contre le pilote d’un ULM employé pour les besoins du film « Donne-moi des ailes ». La responsabilité du réalisateur Nicolas Vanier a été engagée dans cette affaire qui a conduit à la perte de cinq cents oeufs de flamants roses. Autre affaire plus récente, le dresseur de cinéma Pierre Cadéac est actuellement sous le coup de plusieurs plaintes pour des faits de maltraitance volontaire sur des animaux employés dans de nombreux films français. Son cas n’a pas encore été jugé mais une condamnation pénale du dresseur peut-elle engager la responsabilité des productions qui l’ont employé ?

Source : Corinne Lesaine, La protection des animaux sur les tournages pour des productions cinématographiques et publicitaires en France, Mémoire du DE « Protection animale : de la science au droit », Vet Agro Sup, 2018.

Pour aller plus loin : « Maltraitance animale : le dresseur de tigres Mario Masson condamné pour mauvais traitements » – Le Monde


S comme Sentience (ou perception par les sens) : C’est la capacité à ressentir des émotions, de la douleur, du bien-être, et à percevoir de façon subjective son environnement et ses expériences de vie. Pour approfondir la question de la sentience des autres espèces animales, la Fondation Droit Animal a rédigé un article sur cette notion, apparue dans le dictionnaire de la langue française Larousse, en 2020.


T comme Transport : « Nul ne transporte ou ne fait transporter des animaux dans des conditions telles qu’ils risquent d’être blessés ou de subir des souffrances inutiles ». En France, le transport d’animaux vivants est encadré par un Règlement communautaire (2005 – PDF). L’article 3 de ce texte énonce les règles fondamentales à observer lorsque des animaux sont transportés, parmi lesquelles : sa durée doit être réduite au minimum, l’ensemble des besoins des animaux doit y être satisfait pendant toute sa durée et les animaux doivent être placés dans un véhicule adapté. Ainsi, le rôle de l’assistant.e de réalisation sera de limiter au maximum les déplacements imposés à l’animal en concertation avec l’expert.e animalier (vétérinaire, référent.e BEA ou dresseur.e) employé.e sur le projet. En effet, même en prenant toutes les précautions nécessaires, les risques de blessure et de stress pendant le transport restent réels. Par ailleurs, les personnes responsables du transport des animaux pour le compte de la production doivent prouver qu’elles possèdent les documents légaux obligatoires (identification de l’animal, preuve de capacité et/ou de formation adéquate, etc.) en cas de contrôle et satisfaire aux règles suivantes :

Posséder un véhicule agréé, adapté aux caractéristiques et à la protection de l’espèce transportée. Il doit en outre être équipé d’un système de ventilation, de capteurs de température et d’un système d’enregistrement de ces températures ;
Tenir compte des conditions météorologiques : en période de canicule par exemple, il est interdit de transporter des animaux entre 13h et 18h ;
Se tenir informé.e de l’actualité sanitaire de son département : le transport de certaines espèces peut en effet être interdit pendant les périodes d’épidémie animale, telle que la grippe aviaire ou la peste porcine ;
Pour les trajets supérieurs à 65 km, obtenir l’autorisation de la Direction Départementale de la Protection des Populations, et avoir suivi une formation pour le Transport d’Animaux Vivants (TAV).

Sources : « La protection des animaux d’élevage pendant le transport » – Ministère de l’agriculture / Texte intégral du Règlement (CE) n° 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport


U comme Urgence : La présence d’animaux sur un plateau de cinéma justifie normalement la présence d’un.e vétérinaire. Si celui/celle-ci n’est pas présent.e sur l’ensemble des décors, il convient a minima de mettre en place un protocole d’urgence à suivre en cas d‘accidents ou de blessures, en identifiant la/le vétérinaire le plus proche du lieu de tournage et qui pourra intervenir rapidement en cas d’accidents. Dans ce cas, un contrat de soin sera conclu entre la/le Docteur.e-vétérinaire et la/le propriétaire de l’animal. Enfin, il existe en France des établissements habilités à la formation aux premiers secours pour les animaux. Sans se substituer au protocole d’urgence défini avec la/le vétérinaire, il peut permettre de maintenir l’animal en vie en attendant l’arrivée des secours.

Pour aller plus loin : La prise en charge d’un animal en urgence – Veterinaire.fr
Le contrat de soins – Veterinaire.fr


V comme Vétérinaire : Personne qui, diplômée d’une école vétérinaire, pratique la médecine et la chirurgie des animaux. Iels portent le titre de Docteur.e-vétérinaire, qui permet de pratiquer dans un établissement de soin pour animaux, dont l’activité est déclarée, et nulle par ailleurs, sauf dans le cadre d’un contrat de soins (voir « urgence »).

Iels interviennent dans trois domaines principaux : la santé et la protection des animaux ; la sécurité sanitaire des aliments et la santé publique ; la préservation de la faune et de l’environnement. Il existe ainsi plusieurs spécialités en fonction du cursus choisi pendant ou en complément de l’école vétérinaire : vétérinaire canin, équin, rural ; vétérinaire comportementaliste, nutritionniste ; vétérinaire fonctionnaire d’état ou de département, etc. Leurs activités sont, dans tous les cas, encadrées par l’Ordre National des Vétérinaires.

Aujourd’hui, l’offre de soins pour les animaux se diversifient de plus en plus avec l’apparition de nouvelles spécialités telle que l’ostéopathie animale, pratique par ailleurs strictement réservée aux vétérinaires en exercice et inscrits au tableau de l’ordre.

Source : https://www.veterinaire.fr/


V comme Violence : Elle désigne littéralement un abus de force ou dans une acception classique, le fait d’agir « sur quelqu’un ou le faire agir contre sa volonté, en employant la force ou l’intimidation ». Elle est également définie, par le dictionnaire Le Petit Robert, comme une disposition naturelle à l’expression brutale des émotions.

Au cours d’un tournage avec des animaux, la violence peut apparaître dans trois situations-types :

La violence exercée sur un animal pour le contraindre à faire ce qu’il n’est pas disposé à accomplir volontairement. Le fait d’affamer un animal avant ou pendant un tournage, l’attacher pour le maintenir dans une position douloureuse ou dangereuse, ou le forcer à sauter dans l’eau malgré sa peur, constituent des actes de violence par exemple. Ils peuvent être le fait du/ de la dresseur.e ou d’un.e membre de l’équipe. Dans tous les cas, ces actes constituent un délit comme exposé sous le titre « maltraitance » et ne peuvent, en aucun cas, être employés avant ou pendant un tournage. Pour prévenir ces risques de maltraitance, la préparation reste cruciale ainsi que la sensibilisation des équipes dirigeantes (production et réalisation) sur le fait que travailler avec un animal reste un exercice aléatoire, qui nécessite temps, patience et adaptabilité ;

Une scène de violence prévue au scénario. Si dans la narration, la violence est le fait d’un humain sur un autre animal, ou bien d’un animal en direction d’un autre animal (prédation), celle-ci doit dans tous les cas être chorégraphiée, préparée en amont voire sur le décor et SURTOUT simulée. En revanche, s’il s’agit de l’attaque d’un animal vers un des comédien.ne.s, il convient d’ajouter à ces précautions, une réflexion sur le plan de travail : l’animal ne simule pas une attaque, il est stimulé pour attaquer sur demande. Cette action peut donc avoir des conséquences sur les émotions de celui-ci, et sa relation avec ses partenaires de jeu. Il sera donc préférable de placer ces scènes en fin de tournage, toujours selon les recommandations du/ de la dresseur.e ou du vétérinaire ;

La tension sur un tournage peut créer un environnement de violence verbale ou émotionnelle. Ces situations sont communes sur un plateau et si elles peuvent affecter tout autant les membres (humains) de l’équipe, elles ne seront pas comprises et peuvent être un facteur de stress pour l’animal. C’est pourquoi celui-ci doit être le dernier à arriver sur le décor et maintenu dans un endroit au calme entre les prises. C’est également la raison qui impose que l’ensemble des équipes de tournage soit sensibilisé en amont de l’arrivée de l’animal sur le plateau pour maintenir un calme absolu en sa présence.


Z comme Zoochose :  Formé à partir des mots « zoos » et « psychose », la zoochose désigne la catégorie de psychopathologies que les animaux développent dans le cadre d’une captivité. Ces manifestations de souffrance psychique peuvent prendre plusieurs formes, dont les plus courantes sont les stéréotypies (mouvements répétitifs, sans buts), l’automutilation, la toilette excessive, mordre/mâchouiller les barreaux de leur cage, troubles alimentaires (anorexie, jeu avec la nourriture), la coprophilie (fait de manipuler ses excréments), etc…

Elle a pour causes principales l’ennui, le manque – voire l’absence – de liens sociaux, le stress etl’enfermement. Ces pathologies se manifestent en particulier parmi les espèces vivants à l’état naturel sur de très grands espaces (félins, ours), et/ou au sein de communautés sociales très unies (éléphants, singes). 

Michel Kreutzer écrit à ce sujet : « On voit fréquemment les félins, les ours, les éléphants, en fait toutes les espèces vivant habituellement dans de vastes territoires, « tourner en rond », longer les limites de leurs enclos en un va-et-vient incessant, et se balancer quand ils sont à l’arrêt. Les grands herbivores, telles les girafes et les antilopes, penchent répétitivement le cou et la tête d’avant en arrière ; certains prennent pour habitude de mordre ou de mâchouiller leurs barreaux. Chez de nombreux primates, des toilettages excessifs s’accompagnent de léchages prolongés qui provoquent des plaies. Certains arrachent les poils de leur fourrure de manière obsessionnelle et mutilante, comme les perroquets le font avec leurs plumes. » (in Folies Animales, pp.175-176)

Pour y répondre et améliorer la détention de ces individus coupés de leur espace naturel, peu de solutions existent. Celles adoptées par les parcs animaliers sont principalement l’enrichissement de leur espace de captivité, l’agrandissement de leur enclos, ou malheureusement l’administration d’anti-dépresseurs (Valium, Prozac). 

Enfin, certains individus sont intégrés à des programmes de réintroduction dans leur milieu naturel. Mais c’est un processus qui ne va pas sans difficultés puisque ces animaux n’ont appris ni à chasser, ni à se protéger de leurs prédateurs. Face à ce constat, le développement des zoos-refuges peut offrir un cadre de resocialisation lorsque ces programmes sont définis avec une équipe scientifique spécialisée. Michel Kreutzer écrit : « On sait que pour des animaux, comme d’ailleurs pour les humains ayant subi des maltraitances, la resocialisation est une méthode thérapeutique efficace. » Elle est encore rarement utilisée en France. 

Source : Michel Kreutzer, Folies Animales, Le Pommier, Paris, 2021 

Pour des exemples de zoochoses : https://youtu.be/y_uqMRqQlq4

Pour aller plus loin : https://www.bornfree.org.uk/zoochosis


Z comme Zoonomie : Ensemble des lois régissant la vie animale, science de la protection et du respect du droit animal.


Rédaction Laëtitia Pelé avec la contribution de Corinne Lesaine.